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Wednesday, October 04, 2006

Le Tabou Nucléaire


C 'est Gamal Moubarak, le fils du président égyptien et héritier présomptif du pouvoir, qui a lâché la bombe. A la stupeur générale, la semaine dernière lors du congrès annuel du parti national démocrate, la figure montante du parti au pouvoir a annoncé une relance du programme nucléaire civil égyptien. Un coup de théâtre dans un pays où la question est depuis longtemps taboue. Confirmée par la présidence égyptienne, la reprise du programme nucléaire semble être devenue, en l'espace de quelques jours, une priorité gouvernementale. Le conseil national pour l'énergie, réuni d'urgence après dix-huit ans d'inactivité, a confirmé la nécessité pour l'Egypte de se doter d'une source d'énergie alternative. Il s'agit officiellement de pallier l'accroissement des besoins énergétiques de la population. L'Egypte dispose déjà, à Inshas (60 km au nord du Caire), d'un centre de recherche nucléaire et de deux réacteurs civils, l'un fourni par la Russie en 1958 et l'autre acheté à l'Argentine en 1998, mais elle avait gelé tout programme de construction de centrales après la catastrophe de Tchernobyl, en 1986. Signataire du traité de non-prolifération des armes atomiques, elle milite pour un Moyen-Orient dénucléarisé. Une politique qui vise essentiellement Israël, le seul pays de la région à posséder l'arme atomique. «Il est inacceptable [de] fermer les yeux sur le danger que représente la menace nucléaire israélienne pour la stabilité et la sécurité du Proche-Orient», fustigeait encore la semaine dernière le chef de la diplomatie égyptienne Ahmed Aboul Gheit, devant l'Agence internationale à l'énergie atomique.


L'annonce de la reprise du programme nucléaire égyptien s'inscrit dans un contexte de surenchère avec l'Iran. L'Egypte, très attachée à sa stature géopolitique, n'a pas l'intention de laisser Téhéran devenir la seule puissance nucléaire régionale, aux côtés d'Israël. En annonçant la construction, dans un délai de dix ans, d'une centrale de 1 000 mégawatts près d'Alexandrie, elle entend donc se positionner en vue d'une course au nucléaire au Proche-Orient. Mais il s'agit aussi d'un pari politique pour Gamal Moubarak, dont les ambitions supposées sur le fauteuil présidentiel provoquent de fortes réticences en Egypte. En empiétant sur un domaine qui fait partie des pouvoirs régaliens de son père, Gamal se fabrique une popularité à bon compte, les Egyptiens soutenant son initiative.

En pleine crise du nucléaire iranien, une telle annonce avait certes des allures de coup de poker. Mais les Etats-Unis l'ont aussitôt transformée en coup gagnant, en annonçant, par le biais de leur ambassadeur au Caire, qu'ils n'avaient aucune objection au développement du nucléaire civil en Egypte, et en proposant leur assistance. Pour les experts, cette réaction rapide de Washington laisse d'ailleurs penser que la question a été débattue entre Gamal Moubarak et George W. Bush lors d'une visite impromptue et fort controversée du fils du raïs à Washington il y a quelques mois. Une visite qui prendrait aujourd'hui tout son sens.

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